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Ces trois types de contraintes, qui constituent des types idéaux au sens de Max Weber, n'existent jamais à l'état pur : les considérations économiques se combinent souvent avec les enjeux culturels spécifiques, ou ces derniers peuvent être pris dans des enjeux politiques. Mais tel type d'enjeux prédomine dans certaines conjonctures socio-politiques (par exemple, les enjeux politiques pour les littératures circulant depuis ou vers les régimes communistes).
En outre, différents types d'enjeux peuvent co-exister dans des circuits parallèles : l'opposition définie par Pierre Bourdieu (1977, 1992, 1993) entre un circuit de production restreinte et un circuit de grande production permet de prendre en compte la coexistence de la logique économique et de logiques spécifiques sur le marché des biens symboliques. Cette opposition présente l'avantage de renvoyer à des pratiques concrètes (chiffres de tirage) et à des catégories utilisées par les agents : livres de fond, rotation lente vs. rapide, distinction faite par les agents littéraires entre « literary upmarket » et « commercial fiction », etc.
L'hypothèse que nous faisons dans cet article est que chaque type de contrainte implique des normes de traduction particulières du point de vue de la sélection, du découpage et des modalités de traduction des textes.
Ainsi les normes de respect du texte original dans son intégralité, de fidélité au contenu et à la forme (séquences, style, etc.), toute comme l'idée de la supériorité des traductions directes sur les traductions indirectes, qui sont souvent présupposées dans les études sur la traduction, ne constituent qu’un cas particulier des pratiques. Elles se sont imposées à travers la traduction de textes dotés d’une légitimité culturelle, donc selon des règles spécifiques aux champs de production culturelle, et ont été codifiées à travers la législation sur le droit d'auteur : il est significatif, sous ce rapport, que le droit moral de l'auteur, qui interdit de modifier la forme du texte sans l'autorisation de son auteur, soit inaliénable en droit français, alors qu'il est cessible dans la législation du copyright, qui considère les œuvres comme des biens commerciaux avant tout.
Or les normes de respect de l’intégralité du texte et de fidélité au contenu et à la forme ne sont pas observées dans les circuits politisés ou commerciaux. Dans les circuits politisés, ces normes sont subordonnées aux enjeux politiques, comme en témoigne l'exemple des traductions de l'hébreu en arabe : celles qui sont réalisées à l'instigation de l'Etat d'Israël à destination de la population arabe d'Israël sont expurgées de tout ce qui pourrait attiser les tensions entre communautés, tandis que celles qui sont effectuées au sein des pays arabes sélectionnent, à l'inverse, les extraits susceptibles de conforter la relation conflictuelle (Kayyal 2003).
Par-delà ces conditions de circulation surpolitisées des textes, on peut situer à ce pôle la propension à la lecture « ethnographique » des œuvres, appréhendées comme des documents livrant une image de la culture-source plutôt que comme des œuvres littéraires à part entière : ce type d'attentes induit des pratiques de sélection des textes et de traduction qui mettent en avant leur dimension ethnographique ou exotique (Jacquemond 1992, 2006:93, Sapiro 2002).
Le pôle le plus commercial du marché du livre obéit, on l’a dit, à la logique de la rationalisation des coûts en vue de la maximisation des profits sur le court terme. Les normes de traduction seront donc subordonnées à cet objectif: le texte peut être réduit, le travail de traduction réparti entre plusieurs traducteurs pour accélérer le rythme, son contenu adapté à la culture-cible de manière à toucher le public le plus large, son style simplifié, avec peu de souci pour la fidélité au texte d’origine. La littérature pour enfant, dont la circulation s'est fortement commercialisée depuis le début des années 1990 (Sapiro, à paraître), fait l'objet d'un tel traitement.
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